Howards End

Pour certains, les événements ne semblent pas faire trace. À peine creusent-ils un léger sillon dans l’existence, qui se déroule non pas au rythme de la contingence, mais selon la temporalité de leur vie intérieure. Lorsque Howards End s’ouvre sur les lettres qu’Helen adresse à Margaret, le lecteur a d’emblée le sentiment que les soeurs Schlegel font partie de cette catégorie d’anges qui traversent la vie de leur pas immatériel, feutré pour l’aînée, flamboyant pour la cadette. Dans cette confrontation du probable et du matériel, de l’exprimé et de l’indicible, il n’est pas aisé de décider de quel côté le triomphe se situe. C’est donc que l’imagination ne va pas sans la réalité et que seule la synthèse est supportable. Cette synthèse, c’est Howards End qui l’opèrera, demeure imaginaire inspirée de Rooknest, la maison où Forster enfant fut si heureux, propriété où le temps est suspendu et où l’esprit de la défunte Mrs Wilcox poursuit son oeuvre conciliatrice à travers la jeune Mrs Wilcox, qui forme alliance entre les Wilcox et les Schlegel, entre l’Angleterre et l’Allemagne, entre la sensibilité et la raison. Howards End connut un succès retentissant dans l’adaptation que James Ivory en fit à l’écran et valut à Emma Thompson un oscar pour son interprétation de Margaret. –Sana Tang-Léopold Wauters